Fraude fiscale : le guide juridique complet

Au cours de ces dernières années, il est un constat, celui d’une politique pénale qui se mobilise de façon croissante contre les infractions fiscales. Cet intérêt s’accorde tant avec la complexification des fraudes qu’avec l’intérêt que l’opinion public y porte.

La suppression du verrou de Bercy, la création d’institutions spécialisées ont participé à cette pénalisation croissante des infractions fiscales.

Dans ce contexte, il semblait judicieux de revenir sur la définition de ce délit que constitue la fraude fiscale, pour évoquer également, le nouvel arsenal mise à la disposition de l’administration fiscale, ainsi que le développement de la justice négociée en la matière.


I- La pénalisation croissante des infractions fiscales

A - Le délit général de fraude fiscale

1 – Définition et sanctions :

L’article 1741, alinéa 1er du Code général des impôts dispose qu’une personne physique ou morale est coupable du délit de fraude fiscale lorsqu’elle s’est frauduleusement soustraite ou a tenté de se soustraire frauduleusement à l’impôt.

Dès lors, les éléments constitutifs du délit de fraude fiscale doivent réunir :

  • d'une part, l'existence de faits matériels tendant à permettre au contribuable de se soustraire totalement ou partiellement au paiement de l'impôt ;

  • d'autre part, une intention délibérée de fraude.

Ces deux éléments, l'un matériel, l'autre intentionnel, contribuent donc à caractériser le délit de fraude fiscale.

Ainsi, les juges du fond ont valablement relevé la réunion des éléments constitutifs du délit lorsqu'ils énoncent : 

  • que le prévenu a déposé des déclarations de bénéfices et de taxes sur le chiffre d'affaires fortement minorées ;

  • que l'existence de ces dissimulations a été établie par le rapprochement des chiffres déclarés avec ceux figurant dans des documents occultes qui enregistraient les recettes réelles de l'établissement ;

  • que l'élément intentionnel résultait nécessairement de la tenue de ces documents occultes.

Cass. crim. 12-3-1979 : Bull. cass. 1979 

Il s’agit donc de réprimer pénalement la soustraction à l’impôt « indépendamment des sanctions fiscales applicables ». 

Les procédés peuvent être multiples : 

  • Omettre de faire sa déclaration dans les délais prescrits

  • Dissimuler volontairement une part des sommes sujettes à l’impôt

  • Organisation d’insolvabilité

  • Autres manœuvres mettant obstacle au recouvrement de l’impôt…

Les sanctions pénales encourues sont :

Pour les personnes physiques indépendamment des sanctions fiscales applicables, un emprisonnement de cinq ans et une amende de 500 000 € 

Les peines sont portées à 3 000 000 d’euros et sept ans d'emprisonnement lorsque la fraude a été commise en bande organisée ou réalisée ou facilitée au moyen :

  • soit de comptes ouverts ou de contrats souscrits auprès d'organismes établis à l'étranger ;

  • soit de l'interposition de personnes physiques ou morales, ou de tout organisme, fiducie ou institution comparable (trusts ou fondations) établis à l'étranger ;

  • soit de l'usage d'une fausse identité ou de faux documents, ou de toute autre falsification ;

  • soit d'une domiciliation fiscale fictive ou artificielle à l'étranger ;

  • soit d'un acte fictif ou artificiel, ou de l'interposition d'une entité fictive ou artificielle.

Depuis la loi du 23 décembre 2018, le juge pénal peut fixer le montant de l'amende à un montant allant jusqu'au double du produit tiré de l'infraction lorsque celui-ci est supérieur à ces sommes.

Pour les personnes morales : l’amende est égale au quintuple de celle prévue pour les personnes physiques soit 2 500 000 € portée à 15 000 000 € en cas de circonstance aggravante

L’amende là aussi peut également être majorée jusqu’au décuple du produit tiré de l’infraction.

Mais l'auteur doit avoir été animé par une volonté de fraude. La preuve du caractère intentionnel incombe aux parties poursuivantes, ministère public et administration.

2 - Une répression sous conditions :

Le juge pénal, après avoir caractérisé les éléments constitutifs du délit de fraude fiscale de l’article 1741 du CGI, est tenu de vérifier, préalablement au prononcé de sanctions pénales, que les faits retenus présentent le degré de gravité de nature à justifier la répression pénale complémentaire, uniquement lorsque le prévenu de fraude fiscale justifie avoir fait l’objet, à titre personnel, d’une sanction fiscale pour les mêmes faits.(Cass. crim. 7-12-2022 no 22-80.147 F-D).

Ainsi, le Conseil constitutionnel a jugé, au moyen d’une réserve, et en application du principe de nécessité des délits et des peines (DDHC, art. 8), que le cumul des répressions pénale et fiscale ne peut avoir lieu que pour les cas de fraude les « plus graves » (Cons. const. 23-11-2018 no 2018-745 et Cons. Const 24-6-2016 no 2016-545 QPC et 2016-546 ).

Ainsi, s’agissant de la décision du conseil constitutionnel en date du 24 juin 2016, ce dernier a indiqué que :

« Les sanctions pénales ne peuvent pas s'appliquer au contribuable qui a été déchargé de l'impôt par une décision juridictionnelle devenue définitive pour un motif de fond. Elles ne peuvent s'appliquer, en tout état de cause, qu'aux cas les plus graves de dissimulation frauduleuse, eu égard au montant des droits fraudés, à la nature des agissements de la personne poursuivie ou aux circonstances de l’intervention. »

S’agissant de ce dernier critère de gravité suffisante, la jurisprudence de la Cour de cassation est venue le clarifier par 5 arrêts en date du 11 septembre 2019 et a adopté la position suivante :

«Dès lors que la fraude fiscale est établie, le juge pénal doit vérifier, le cas échéant d'office, que les faits retenus présentent le degré de gravité de nature à justifier la sanction pénale, en complément de la répression fiscale. Il doit motiver sa décision sur ce point » (Cass. crim. 11-9-2019 n° 18-81.067, 18-82.430 et 18-84.144).


B - Le contexte récent

Le législateur et l’exécutif ont progressivement créé des institutions spécialisées telles que l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières (OCLCIFF – décret n°2013-960 du 25 octobre 2013 portant création d’un office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales) et le Parquet national financier (PNF – loi n°2013-1117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière). Ce dernier dispose d’une compétence nationale pour les délits boursiers, les atteintes à la probité et la fraude fiscale.

La police judiciaire et le ministère public accroissent donc leur technicité pour traiter au mieux ce type de dossiers et concomitamment leur afflux, amplifié depuis 2018 suite à la suppression du verrou de Bercy.

L’expression « verrou de Bercy » désignait le dispositif qui encadrait l’engagement des poursuites pénales en matière de fraude fiscale avant la loi du 23 octobre 2018 dite « fraude ».

En effet, l’administration fiscale, engageait des poursuites pénales pour fraude fiscale devant le tribunal correctionnel par le biais du dépôt d’une plainte, après avoir obtenu l’avis favorable de la CIF (la commission des infractions fiscales).

L’article 36 de cette loi mettait donc fin au monopole de Bercy et obligeait l’administration fiscale à dénoncer au parquet les faits les plus graves.

L’une des mesures phare de cette loi est l’instauration d’une procédure de dénonciation automatique au parquet de la part de l’administration, des faits de fraude fiscale les plus graves.

L'article L 228 du LPF, tel qu'il a été aménagé par l'article 36 de la loi 2018-898 du 23 octobre 2018, distingue deux catégories de délits pour l'engagement des poursuites :

1) - ceux pour lesquels la dénonciation au parquet par l'administration est obligatoire ;

2) - ceux pour lesquels l'administration prend l'initiative des poursuites par le biais du dépôt d'une plainte.

«  I. Sans préjudice des plaintes dont elle prend l'initiative, l'administration est tenue de dénoncer au procureur de la République les faits qu'elle a examinés dans le cadre de son pouvoir de contrôle prévu à l'article L 10 qui ont conduit à l'application, sur des droits dont le montant est supérieur à 100 000 € :
1°  Soit de la majoration de 100 % prévue à l'article 1732 du code général des impôts ;
2°  Soit de la majoration de 80 % prévue au c du 1 de l'article 1728, aux b ou c de l'article 1729, au I de l'article 1729-0 A ou au dernier alinéa de l'article 1758 du même code ;
3°  Soit de la majoration de 40 % prévue au b du 1 de l'article 1728 ou aux a ou b de l'article 1729 dudit code, lorsqu'au cours des six années civiles précédant son application le contribuable a déjà fait l'objet lors d'un précédent contrôle de l'application des majorations mentionnées aux présents 1°, 2° ou 3° ou d'une plainte de l'administration. »

Les critères retenus, sont le seuil des droits éludés, qui en la matière doivent être supérieurs à 100 000€ et assortis de l’une des majorations prévues audit article lesquelles concernent :

L’opposition à contrôle fiscal, (100%)

  • La découverte d'une activité occulte faisant suite à une omission déclarative, (80%)

  • L’abus de droit ou les manœuvres frauduleuses constatés au titre d'une insuffisance de déclaration

  • Le manquement délibéré etc… »(40%).

Cette procédure de dénonciation automatique telle prévue à l’article L 228, I, du LPF, ne s’applique pas aux contribuables qui déposent spontanément une ou plusieurs déclarations destinées à rectifier leur situation fiscale antérieure.
La doctrine administrative indique à cet égard, que ne constitue pas une démarche spontanée le dépôt d'une déclaration rectificative (ou initiale) alors qu'un contrôle fiscal est en cours, que le contribuable a reçu un avis de vérification ou qu'il fait l'objet d'une procédure d'enquête administrative ou judiciaire.

Évolution du nombre de dossiers de fraude fiscale ayant fait l’objet d’une transmission au parquet

Source : « Fraude et évasion fiscales : faire les comptes et intensifier la lutte » Rapport d’information n°72 (2022-2023), déposé le 25 octobre 2022 

Dans ce contexte, la lutte contre la fraude fiscale est également renforcée et accentuée par tout un arsenal juridique, prévu entre autres dans le projet de loi de finances pour 2024.

Plusieurs articles de ce projet visent la lutte contre la fraude aux finances publiques :

  • Article 19 : Renforcement des moyens de l’administration fiscale en matière de détection et de sanction de la fraude fiscale et cadre juridique applicables, aux fraudes à la TVA, en l’adaptant aux enjeux de l’économie numérique. Il est prévu la possibilité de déférencer les vendeurs des plateformes juridiques ne respectant pas leurs obligations fiscales.

  • Article 20 : Création d’un délit de mise à disposition d’instruments de facilitation de la fraude fiscale.

  • Article 21 : Renforcement de la réponse pénale aux fraudes, avec une peine complémentaire de privation des droits à réductions d’impôts et crédits d’impôts sur le revenu et sur la fortune immobilière.

  • Article 22 : Renforcement du contrôle des prix de transfert des entreprises multinationales. Le seuil serait abaissé et pourrait concerner les entreprises d’au moins 150 millions d’euros de chiffre d’affaires contre 400 millions aujourd’hui.

    Article 23 : Amélioration des conditions matérielles de réalisation des contrôles fiscaux externes


II - Développement de la justice négociée en matière fiscale

La lutte contre les infractions fiscales sur le plan pénal, le développement des institutions répressives ainsi que de leurs compétences se poursuivent tout en composant avec des moyens matériels et humains limités.

Face à la saturation de la justice et la densité du contentieux, les parquets se tournent progressivement vers la justice négociée avec la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) et la convention judiciaire d’intérêt public (CJIP).

A - La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité

1)    Régime général

La comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) est un instrument de politique pénale créé par la loi « Perben II » de 2004. Elle est codifiée aux articles 495-7 et suivants du code de procédure pénale (CPP).

Cette procédure de « plaider coupable » est applicable à une personne physique ou morale qui reconnait avoir commis un délit de droit commun. Elle se divise en deux phases : la proposition du procureur et l’homologation.

En effet, la CRPC est à la seule initiative du ministère public. Même si la personne peut demander l’application de cette procédure, le procureur n’accepte que s’il l’estime opportune. Le procureur peut proposer au prévenu une peine (emprisonnement ou amende) assortie du sursis ou non, des peines complémentaires (interdiction de gérer, inéligibilité) ou encore des mesures d’aménagements. La peine d’emprisonnement ne peut être supérieure à trois ans ni excéder la moitié de la peine d'emprisonnement encourue. La peine d’amende, quant à elle, ne peut excéder le montant de l’amende encourue.

La personne concernée peut disposer d’un délai de dix jours pour accepter ou refuser la proposition du procureur. En cas de refus, l’audience correctionnelle aura lieu. En cas d’acceptation et suite aux déclarations de reconnaissance des faits, la personne est présentée au président du tribunal judiciaire que le procureur a saisi d’une requête en homologation.

Le juge produit alors une ordonnance motivée qui vérifie la reconnaissance des faits, leur qualification juridique ainsi que la proportionnalité de la peine. Les peines sont souvent homologuées et ont l’effet d’un jugement de condamnation. Ainsi, il est possible d’en faire appel.

2)    Extension de la CRPC à la fraude fiscale

Tel qu’indiqué, la CRPC n’est en principe applicable qu’aux délits de droit commun. Avant 2018, l’article 495-16 du CPP disposait qu’elle ne pouvait être utilisée pour les mineurs, pour les délits de presse, d’homicides involontaires, les délits politiques, les délits d’atteintes volontaires et involontaires à l’intégrité des personnes, certains délits d’agressions sexuelles ainsi que la fraude fiscale.

L’article 24 de la loi n°2018-898 du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude a modifié cette règle en étendant la CRPC aux délits de fraude fiscale.

Comparaison des délais de traitement des affaires de fraude fiscale pour lesquelles l'administration fiscale s'est portée civile en 2019 et 2020 (en mois)

Source : commission des finances, d'après les réponses de la DGFiP au questionnaire du rapporteur

On dénombre un recours aux CRPC « fiscales » exponentielle 2021. Les magistrats des sections économiques et financières du parquet du tribunal judiciaire de Paris estiment qu’il s’agit d’une « procédure très adaptée au contentieux et au profil des fraudeurs fiscaux ».[1]

En premier lieu, la CRPC tendait à s’appliquer pour des dossiers simples. Néanmoins, la circulaire du 4 octobre 2021 incite les parquets à élargir leur champ d’action. Elle suggère d’user de cette procédure d’une manière « aussi large que possible » et ce « tant dans les cas de fraude des personnes physiques que morales, et ce, quels que soient les montants fraudés ».[2] L’évolution des montants des amendes prononcées confirment également la prise d’ampleur de la CRPC.

Montant moyen et médian des amendes fermes prononcées dans le cadre d'une procédure de CRPC pour des faits de fraude fiscale 51 ( * ) (en euros)

Source : commission des finances d'après les données transmises par la direction des affaires criminelles et des grâces en réponse au questionnaire du rapporteur

Voici un exemple pratique de justice négociée au Parquent National Financier, plus précisément une comparution sur reconnaissance de culpabilité en matière de fraude fiscale :

Une CRPC a été réalisée sur une peine de trois ans d’emprisonnement avec sursis, 885 800 euros d’amende et une confiscation des sommes saisies au cours de l’enquête à hauteur de 14 200 euros. Le couple concerné reconnaissait sa culpabilité en matière de fraude fiscale, de fraude fiscale aggravée et de blanchiment aggravé de fraude fiscale pour ne pas avoir déclaré des comptes détenus à l’étranger (Suisse, Singapour, Bahamas, Panama). Au total, le montant des droits éludés était évalué à 1,3 millions d’euros au titre de l’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux et à 350 000 euros au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune. Les avoirs dissimulés s’élevaient à 6 millions d’euros. Préalablement à la CRPC, le couple avait régularisé sa situation avec le fisc et les sommes dues avaient été mises en recouvrement intégral.


B - La convention judiciaire d’intérêt public

1)    Régime général

La convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) a été créée en 2016 par la loi dite « Sapin 2 ». (Loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique).

Elle est codifiée à l’article 41-1-2 du Code de Procédure Pénale.

Cette convention peut être proposée par le procureur de la république tant que l’action publique n’a pas été mise en mouvement. Elle constitue une alternative aux poursuites en permettant de régler un litige via une transaction effectuée entre le procureur de la république et une personne morale. Elle n’est pas autorisée pour les personnes physiques.

La conclusion d’une telle convention imposant une ou plusieurs obligations qui sont énumérées audit article.

Ainsi sont prévues :

  • le versement d’une « amende d’intérêt public » au Trésor public. Le montant de l’amende se doit d’être proportionné aux avantages tirés des manquements constatés. Il ne peut excéder 30% du chiffre d’affaires annuel moyen sur les trois derniers chiffres d’affaires connus à la date du constat des manquements.

  • la mise en œuvre d’un plan de mise en conformité élaboré par l’Agence française anti-corruption d’une durée maximale de trois ans.

  • lorsque la victime est identifiée, et sauf si la personne morale mise en cause justifie de la réparation de son préjudice, la CJIP prévoit le montant et les modalités de la réparation des dommages causés par l'infraction  

À l’instar de la CRPC, la procédure de CJIP doit être soumise au président du tribunal judiciaire. Le procureur saisit ce dernier d’une requête en validation – et non en homologation (CRPC)- qui détaille les faits et leur qualification juridique. Le juge auditionne la ou les personnes morales mise en cause ainsi que la ou les victimes au cours d’une audience publique.

Après avoir vérifié le bien-fondé, la régularité de la procédure ainsi que du montant des amendes, le juge peut rendre une ordonnance de validation ou non. Dans le premier cas, la personne dispose d’un droit de rétractation de dix jours. La victime ne dispose d’aucun recours. Dans le second cas, ou en cas de rétractation, le procureur engage les poursuites selon le droit commun.

La CJIP validée n’a donc ni la nature, ni les effets d’un jugement de condamnation. Elle n’est pas inscrite au bulletin n°1 du casier judiciaire, néanmoins, l’ordonnance de validation, le montant de l’amende d’intérêt public et la convention sont publiés sur les sites internet des ministères de la justice et du budget.

2)    Extension à la matière fiscale

Lors de création et avant la loi relative à la fraude fiscale de 2018, la CJIP n’était pas réservée au délit de fraude fiscale.

Par exception, la fraude fiscale n’était pas susceptible d’une telle convention – à la différence du blanchiment de fraude fiscale - en raison du verrou de Bercy. La CJIP lui a été logiquement ouverte lors de la réforme du verrou (article 25 de la loi n°2018-898 du 23 octobre 2018 relative à la fraude fiscale).

À la différence de la CRPC, la circulaire du 4octobre 2021 préconise « en priorité [la CJIP] dans des dossiers à fort enjeu financier ». En effet, la manœuvre étant plus complexe que la CRPC (négociations plus longues et articulation avec l’administration fiscale). Par ailleurs, le PNF est l’acteur de référence pour réaliser ces conventions, en raison de sa compétence nationale et de son expérience.

L’apport de la CJIP ne réside pas dans le délai de traitement des dossiers. Les procédures de CJIP ont même tendance à s’allonger depuis 2019 (trois ans à plus de 9 ans en 2021). Cela s’explique par la complexité croissante des fraudes et du blanchiment qui impose de plus grandes investigations. Or, il est préconisé au procureur d’assoir les manquements reprochés, notamment afin de chiffrer avec davantage de précision le préjudice.

Ainsi, la CJIP existe surtout en tant qu’outil pour produire une réponse adaptée aux délits complexes et réduire le risque de non-recouvrement suite à un procès.

Le Parquet national financier (PNF) a publié le 16 janvier 2023 les lignes directrices sur la mise en œuvre de la CJIP.

S’agissant plus particulièrement de la fraude fiscale il convient de retenir qu’une issue fiscale doit être trouvée préalablement ou concomitamment à la signature de la CJIP.

Cela signifie qu’il doit exister un accord entre l’entreprise et l’administration fiscale, ce dernier pouvant se matérialiser sous la forme d’une acceptation expresse des rectifications proposées, d’une transaction fiscale ..

Par ailleurs, et parmi les conditions de mise en œuvre de la CJIP, une coopération de bonne foi de la personne morale est requise.

[1] « Fraude et évasion fiscales : faire les comptes et intensifier la lutte » Rapport d’information n°72 (2022-2023), déposé le 25 octobre 2022

[2] Ibid.


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