La disproportion de l’engagement de caution du dirigeant : avant et après la réforme de 2021
Le cautionnement du dirigeant est un engagement lourd de conséquences, puisqu’il engage directement son patrimoine personnel pour garantir les dettes de son entreprise.
L’ordonnance du 15 septembre 2021, entrée en vigueur le 1er janvier 2022 a sensiblement modifié la matière.
1. L’analyse de la disproportion avant la réforme de 2021 :
L’article L. 332-1 du Code de la consommation disposait que :
« Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ».
L’engagement de la caution personne physique ne pouvait pas être manifestement disproportionné à ses biens et revenus.
La sanction était radicale : le créancier professionnel ne pouvait pas se prévaloir du cautionnement, sauf si la caution était revenue à meilleure fortune au moment de l’appel en paiement.
La preuve de cette disproportion intervenait à deux moments. Au jour de la signature de l’acte de cautionnement : la caution devait démontrer la disproportion entre le montant pour lequel elle s’était engagée et le montant de ses biens et revenus. Ensuit et si la disproportion était avérée ; le créancier devait établir que le patrimoine de la caution lui permettait finalement de faire face, le jour où la caution était appelée en paiement.
La sanction en cas de disproportion manifeste entre le montant dudit acte et le patrimoine de la caution, était l’inopposabilité de l’engagement de caution à la caution elle-même.
2. L’analyse de la disproportion après la réforme de 2021 :
Depuis le 1er janvier 2022, l’article 2300 du Code civil encadre la disproportion.
Le cautionnement manifestement disproportionné n’est plus annulé.
Il est réduit au montant que la caution pouvait raisonnablement garantir au moment de son engagement.
La règle du retour à meilleure fortune disparaît : la situation patrimoniale de la caution lors de l’appel en paiement n’est plus prise en compte.
L’appréciation de la disproportion se fait uniquement au jour de la signature.
Le juge doit réduire l’engagement au montant objectivement supportable par la caution.
3. L’obligation de mise en garde du créancier.
La principale modification de la réforme consiste à supprimer le distinguo entre caution avertie et caution non avertie, qui avait donné lieu à une jurisprudence fleuve de la part de la Cour de cassation.
Avant la réforme : elle portait sur la disproportion de l’engagement de la caution.
Depuis la réforme : elle est codifiée à l’article 2299 du Code civil et vise l’inadaptation de la dette du débiteur principal par rapport à ses capacités financières.
Sa violation entraîne une déchéance partielle des droits du créancier, à hauteur du préjudice subi par la caution (perte de chance de ne pas s’engager).
4. Le formalisme de la mention manuscrite dans l’acte de cautionnement signé par le dirigeant
Le cautionnement du dirigeant est soumis à un formalisme strict, dont la finalité est de protéger la caution contre des engagements dont elle ne mesurerait pas pleinement la portée. La réforme du 15 septembre 2021, entrée en vigueur le 1er janvier 2022, a profondément modifié ce formalisme.
a) Avant la réforme : un formalisme rigide et sanctionné par la nullité
Jusqu’au 31 décembre 2021, l’ancien article L. 331-1 et L331-2 du Code de la consommation imposait une mention manuscrite très précise.
La caution devait recopier intégralement et à l’identique la formule légale.
Toute omission, modification ou formulation différente entraînait la nullité du cautionnement, sauf erreurs purement matérielles (ponctuation, grammaire).
La jurisprudence avait cependant admis certaines tolérances, par exemple :
l’omission du mot « biens » limitait le gage du créancier aux seuls revenus de la caution, sans annuler l’acte ;
la juxtaposition des mentions légales pouvait être tolérée si le sens de l’engagement n’était pas affecté.
La signature devait en principe précéder la mention, mais certaines décisions admettaient la validité si la mention suivait d’un paraphe.
b) Après la réforme : un formalisme unifié et assoupli
Depuis le 1er janvier 2022, le formalisme est défini par l’article 2297 du Code civil.
La caution doit indiquer dans l’acte, à peine de nullité, qu’elle s’engage à payer au créancier ce que doit le débiteur en cas de défaillance, dans la limite d’un montant exprimé en toutes lettres et en chiffres.
En cas de différence entre les deux, c’est la somme écrite en toutes lettres qui prévaut.
La mention n’est plus figée dans une formule imposée : le texte est plus souple et compatible avec la dématérialisation (signature électronique).
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